Impact Environnemental de la Viande : Au delà des Idées Reçues (Climat, Eau, Sol)

L’Empreinte Écologique de l’Élevage : Ce N’est Pas Tout Noir ou Tout Blanc

On l’entend partout : élever des animaux pour la viande détruit la planète. Si l’élevage industriel intensif, le système dominant aujourd’hui, cause des dégâts indéniables, le tableau complet est plus nuancé. Il faut regarder comment les animaux sont élevés. L’élevage fait partie des écosystèmes depuis des millénaires ; c’est l’échelle industrielle et les méthodes actuelles qui posent de gros problèmes.

Pâturage verdoyant avec vaches vs Vue aérienne d'un parc d'engraissement surpeupl

Gaz à Effet de Serre : Méthane, CO2, et Vue d’Ensemble

L’élevage compte pour environ 14.5% des gaz à effet de serre mondiaux causés par l’homme. Mais décortiquons ce chiffre :

  • Les Calculs Diffèrent : Souvent, les émissions de l’élevage incluent tout le cycle (production d’aliments, transport…), alors que pour les transports, on ne compte parfois que la combustion directe. La comparaison n’est pas toujours juste.

  • Sources Principales :

    • Déforestation : Une part énorme vient du changement d’usage des terres, comme raser la forêt amazonienne pour cultiver le soja et le maïs destinés aux animaux en élevage intensif.

    • Engrais Azotés : Produire cette nourriture dépend massivement d’engrais synthétiques fabriqués à partir d’énergies fossiles (un point souligné par des experts comme Jancovici).

    • Méthane (CH4) : Vient de la digestion des ruminants (surtout les rots). C’est un gaz puissant, mais il reste moins longtemps dans l’atmosphère que le CO2. Surtout :

      • Les animaux mangeant de l’herbe émettent nettement moins de méthane (jusqu’à moitié moins) que ceux nourris au grain (soja/maïs fermentent plus).

      • Les pâturages bien gérés agissent comme des puits de carbone : les plantes capturent le CO2 et le stockent dans le sol via leurs racines, un processus stimulé par le broutage.

  • Empreinte Carbone Très Variable : L’empreinte carbone d’1kg de bœuf peut varier d’un facteur 10 selon l’élevage ! Un système régénératif basé sur le pâturage peut être neutre en carbone, voire négatif (stocke plus qu’il n’émet). Les systèmes intensifs liés à la déforestation sont d’énormes émetteurs.

Conclusion rapide : Blâmer « la viande » en général est trop simple. Les gros problèmes environnementaux viennent des systèmes industriels dépendants du grain importé et des engrais fossiles. Un élevage bien géré en pâturage peut faire partie de la solution climatique.

Utilisation de l’Eau : Démêler les Mythes

Vous avez sûrement entendu le chiffre : 15 000 litres d’eau pour 1kg de bœuf. Ce chiffre est très trompeur. Il compte surtout l’eau de pluie (« eau verte ») qui tombe de toute façon sur les pâturages. L’eau réellement prélevée dans les rivières ou nappes (« eau bleue ») est bien moindre.

  • Des études (comme celles de l’INRA en France) suggèrent plutôt 200 à 700 litres d' »eau bleue » par kg de bœuf dans beaucoup de systèmes.

  • Comparez avec environ 480L pour 1kg de pain, 550L pour des pâtes, ou 770L pour du riz.

  • Encore une fois, le système compte. Un élevage intensif qui demande une irrigation massive pour le maïs ou le soja utilise plus d' »eau bleue » que des animaux broutant sur une prairie arrosée par la pluie.

Conclusion rapide : L’élevage n’est pas forcément le gouffre en eau potable qu’on décrit, surtout comparé à certaines cultures irriguées. Comment les animaux sont élevés est le facteur clé.

Usage des Terres et Santé du Sol : Les Deux Faces de l’Agriculture

  • Terres Non Cultivables : Environ 60% des terres agricoles mondiales ne conviennent pas aux cultures (trop rocheuses, pentues…). Souvent, la seule façon d’y produire de la nourriture est via le pâturage par des ruminants. Sans élevage, ces terres pourraient s’éroder ou devenir sujettes aux incendies.

  • Destruction vs Régénération :

    • Le Mauvais : L’élevage intensif pousse à la déforestation (ex: Amazonie pour le bœuf et le soja fourrager). La monoculture (champs immenses de soja, maïs, blé…), pour humains ou animaux, épuise les sols, réduit la biodiversité (vers de terre, insectes) et augmente l’érosion. Elle dépend lourdement de pesticides et d’engrais synthétiques polluants.

    • Le Bon : L’élevage régénératif sur prairie permanente protège le sol de l’érosion, augmente la matière organique (rendant le sol plus riche et retenant mieux l’eau), et favorise la vie du sol grâce aux déjections animales (engrais naturel). Les haies autour des pâturages créent des corridors vitaux pour la faune. (Voir aussi les travaux d’experts comme Claude Bourguignon sur la mort des sols agricoles modernes).

  • Impact sur la Biodiversité : L’agriculture intensive (animale ou végétale) détruit la biodiversité (perte d’habitat, pesticides). Les machines agricoles lors des récoltes de céréales ou légumineuses tuent énormément de petits animaux et insectes. Par contre, l’élevage extensif bien géré, avec ses prairies diverses et ses haies, peut offrir un refuge précieux.

Conclusion rapide : Opposer simplement « élevage mauvais pour le sol / cultures bonnes » est faux. L’agriculture intensive (animale OU végétale) dégrade les sols et la vie. L’élevage régénératif basé sur le pâturage est un outil puissant pour restaurer la santé des sols et soutenir la biodiversité. Intégrer intelligemment cultures et élevage est clé.

Pollutions : Antibiotiques, Hormones, Nitrates

Ces problèmes sont quasi exclusivement liés à l’élevage industriel intensif :

  • Antibiotiques/Médicaments : Utilisés en masse (souvent préventivement) car les animaux entassés, stressés et sélectionnés pour produire au maximum tombent facilement malades. Ces produits finissent dans l’eau et les sols, et contribuent à l’antibiorésistance. Les élevages de qualité (bio, régénératifs) les utilisent très peu ou pas du tout, préférant des races robustes et des conditions de vie saines.

  • Hormones : Les hormones de croissance sont interdites en Europe pour l’élevage, mais d’autres hormones (pour la reproduction) peuvent être utilisées dans certains systèmes industriels.

  • Nitrates/Phosphates : Viennent des quantités énormes de fumier concentré près des élevages intensifs, ou de l’épandage excessif d’engrais (synthétiques ou fumier) sur les cultures fourragères. Ils polluent l’eau (causant les algues vertes). Un élevage extensif avec un nombre adapté d’animaux ne pose pas ce problème.

Conclusion : L’impact environnemental désastreux souvent attribué à « la viande » est en fait celui du modèle agricole industriel dominant. Élever des animaux vertueusement, en harmonie avec l’environnement local, en utilisant le pâturage et en respectant les cycles naturels, a un bilan écologique radicalement différent, parfois même positif (pour le sol, le carbone, la biodiversité). Remettre en question tout le système alimentaire industriel, sa dépendance aux énergies fossiles et sa course au bas prix est plus pertinent que de cibler uniquement la consommation de viande.


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